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l'archétype
du guerrier
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CASTANEDA, Carlos, Le voyage à Ixtlan Éd.
Gallimard
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Le modèle du guerrier est un archétype de l’inconscient
collectif. On en trouve des manifestations à toutes les époques et dans
toutes les cultures, qu’il s’agisse du Chevalier ou du Samouraï...
l’action
Le guerrier se réalise par son action dans le monde. Son
yoga est le karma (action).
Son action se définit sur deux plans:
• à l’extérieur, le modèle du guerrier
commande de se mettre au service d’une cause.
Il n’est pas ici question de porter un jugement
de valeur sur les causes historiques servies par les guerriers, mais
plutôt de retrouver l’esprit qui les animait.
• à l’intérieur, il commande au guerrier
de travailler sur lui-même, car c’est avant tout sur lui-même qu’il
doit remporter une victoire.
Don Juan, le héros de Castaneda, rappelle à son disciple :
" La différence entre un guerrier et une
personne ordinaire, c’est que le guerrier voit tout comme un
défi, une opportunité de grandir, alors que la personne ordinaire
voit tout ce qui lui arrive comme une chance ou une malédiction. Le
guerrier ne croit ni à la chance ni à la malédiction. Il prend complètement
en charge ce qui lui arrive. "
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Shambhala
– La voie sacrée du guerrier Éd. Seuil
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la guerre sainte
La guerre possède un symbolisme important. De ce point de
vue – mais de ce point de vue seulement, je le précise – elle
a pour fin la destruction du mal, le rétablissement de la paix, de la
justice, de l’harmonie, aussi bien sur le plan cosmique que social.
Dans la tradition hindoue, la guerre est la fonction des
kshatriya (guerrier en sanskrit) : Krishna est un kshatriya.
" Guerriers, guerriers,
nous appelons-nous. Nous combattons pour la vertu élevée, pour le haut
effort, pour la sublime sagesse. La victoire sur le soi dompté... "
Anguttara-nikâya
Dans la tradition bouddhique, qui m’intéresse d’autant
plus que le bouddhisme est bien connu pour son pacifisme, on a recours
pourtant au symbolisme guerrier. Le Bouddha est, lui aussi, un kshatriya.
Dans le Dhammapâda, il est dit du Bouddha :
" Le
guerrier brille dans son armure. "
Chez les bouddhistes tibétains en particulier, on accorde
une place importante à la Voie du guerrier. Son entraînement vise
à l’ouverture aux autres, à la compassion. Le maître tibétain Chögyam
Trungpa définit ainsi cette démarche :
" Pour le guerrier,
l’expérience du cœur tendre est ce qui lui donne son courage.
La vraie bravoure est le fruit de la sensibilité. Vous êtes prêts à
vous ouvrir au monde sans résistance et à faire face au monde. Vous
êtes prêts à partager votre cœur avec les autres. Sans sensibilité,
le courage est fragile comme la porcelaine. "
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Initiation
à la symbolique romane Paris, 1964, édité dans la collection " Champs ",
1977
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Par ailleurs, dans la tradition chinoise, ce qui est combattu,
ce sont les puissances destructrices. Les combats des sociétés secrètes
sont des combats d’initiés : leurs guerres visent à abattre
T’sing (les ténèbres) et à restaurer Ming (la lumière).
" l’affrontement des ténèbres et de la
lumière "
On retrouve le même symbolisme en Occident, notamment au
Moyen Âge, où sont apparus les ordres militaires : Hospita-liers,
Templiers et les Chevaliers teutoniques. Ces guerriers se définissaient
aussi comme des moines, car la véritable guerre sainte est celle qui se
livre à l’intérieur.
" Quand il est parlé de
guerre dans les textes traditionnels chrétiens, cette expression doit
être aussi comprise dans un sens de guerre intérieure [...], précise
Marie-Madeleine Davy. Il ne s’agit pas d’une guerre extérieure
livrée avec des armes. La guerre sainte est la lutte que l’homme
livre en lui-même. Elle est l’affrontement des ténèbres et de la
lumière en lui. Elle s’accomplit dans le passage de l’ignorance
à la connaissance. [...] Les armes et les combats de la guerre sainte
sont d’ordre spirituel. "
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En quoi l’archétype du guerrier peut-il nous être utile, ici et maintenant?
Nous traversons une crise
de civilisation. Elle nous impose une redéfinition
collective et individuelle. Dans cette rubrique, je vous propose une réflexion
éclatée sur cette crise et sur les raisons pour lesquelles j’estime
que le modèle du guerrier peut nous servir dans cette redéfinition.
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l'émergence
du nouveau guerrier
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AUBREY,
Bob.
Les nouveaux guerriers; France années 90: la quête de la maîtrise de soi
Éd. Autrment
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Il y a quelques années, Bob Aubrey dans l’introduction d’un
ouvrage collectif sur Les nouveaux guerriers signalait
" l’apparition d’un type d’homme et de femme
dont le goût de l’action rappelle à maints égards l’archétype
du guerrier ".
Plus loin : " Au
premier niveau, ils (ces nouveaux guerriers) représentent ceux qui assument
leur agressivité et qui acceptent la nécessité des conflits. Mais ils
recherchent, au-delà de leurs luttes et leurs stress, l’idéal de
la maîtrise de soi dans l’espoir de trouver du sens au travers
de leur action. "
Depuis de nombreuses années j’observe, quant à moi,
que le modèle du guerrier, sans qu’il soit pour autant toujours identifié
ou reconnu comme tel, se manifeste de plus en plus dans divers domaines
de l’action: celui du sport de compétition, de l’entre-prise,
de l’action sociale, etc.
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MILLMAN,
Dan.
L’Athlète au cœur guerrier (éd. Vie nouvelle).
Le
guerrier pacifique (éd. Soleil).
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que ce soit dans le monde du sport...
L’entraînement physique dans le sport recouvre déjà
la dimension de l’entraînement du guerrier traditionnel qui, dans
certaines disciplines, par exemple celle des arts martiaux, passe par
le corps. Mais c’est de la dimension psychospirituelle de l’entraînement
de certains sportifs dont je veux ici faire état. L’entraînement
des sportifs de compétition qui comporte désormais la
maîtrise du mental, évoquant en cela celui du guerrier traditionnel.
Cette dimension, on la trouve aussi, entre autres, dans
l’entraînement que suggère Dan Millman, champion du monde de trampoline
et entraîneur de niveau international. Millman a fait paraître un ouvrage
remarquable dans lequel il propose un profil du sportif " qui
développe simultanément son mental, son affectif et son corps physique
pour améliorer ses performances sportives et enrichir la qualité de
la vie quotidienne ". Le sport,
conçu jusqu’ici comme une activité exclusivement physique, devient
avec Millman et d’autres le lieu d’une démarche globale, la
maîtrise que le sportif acquiert par le sport s’étendant à l’ensemble
de son être.
Dans la plus pure tradition zen, Millman suggère de susciter
l’harmonie naturelle du corps, du mental et des émotions :
" Lorsque le corps, entièrement
détendu et plein d’énergie, est sensible et ouvert à la vie; [...]
lorsque les émotions, libérées de toute tension gênante, se manifestent
comme pure émotion; [...] lorsque le mental, libéré des distractions
internes n’est plus que pure attention à l’instant présent
[...] un déclic se produit. C’est le satori, un état que connaissent
occasionnellement tous les athlètes, les artistes, les musiciens, etc. "
La culture occidentale redécouvre ces années-ci divers
chemins qui mènent à l’harmonie du corps et de l’âme. Millman
n’hésite pas à suggérer d’absorber et d’intégrer ces
enseignements pour former une nouvelle race d’athlètes. Mais que
l’on aspire ou non aux sommets de l’athlétisme de compétition,
ce qui n’est certes pas le fait de la plupart d’entre nous,
nous pouvons par la pratique du sport, dans une perspective de développement
personnel, améliorer notre qualité de vie. Millman suggère d’appliquer
les règles athlétiques telles qu’il les définit aux plans mental
et affectif aussi bien que physique, au Jeu de la Vie.
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PATER,
Robert.
Les arts martiaux et l’art du management,
Éd. Albin Michel
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... dans le monde de l’entreprise...
C’est dans l’entreprise que Bob Aubrey, dont
j’ai parlé précédemment, observe plus spécialement l’apparition
de ce type d’homme et de femme dont " le goût de l’action
rappelle à maints égards l’archétype du guerrier ". Il
souligne plus loin que " ces ‘ nouveaux guerriers ’
portent plutôt l’attaché-case que le bouclier, la cravate que le
blason; ils préfèrent les batailles économiques et sociales aux war
games [...]. "
L’intérêt pour ce modèle dans le monde de l’entreprise
s’est traduit par un courant alimenté par la parution de nombreux
ouvrages destinés à " ce type d’homme et de femme ".
Ce courant me paraît comporter deux voies. La première fait appel aux
qualités du guerrier traditionnel telles qu’on les retrouve par
exemple dans les arts martiaux.
" Être efficace dans l’action,
écrit Robert Pater, se concentrer sur ses buts et développer toutes
ses capacités mentales, physiques, spirituelles et émotionnelles, tels
sont les objectifs clés des arts martiaux. "
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CHAREST,
Gilles.
Du management à l’écogestion,
Éd. Louise Courteau
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C’est dans cette voie que l’influence de Miyamoto
Musashi, légendaire escrimeur japonais, a été déterminante. Mais
je ne voudrais pas donner l’impression que seule la tradition japonaise
inspire une démarche sur cette voie. Nous sommes à l’ère planétaire
et l’éclectisme, voire le syncrétisme, qu’on le veuille ou
non, paraît inévitable, ce qui d’ailleurs rend difficile la distinction
entre les deux voies dont je parle ici. Quoi qu’il en soit, la
seconde met plutôt l’accent sur un travail sur soi inspiré par
la psychologie moderne.
C’est ainsi que, comme l’écrit
Gilles Charest :
" [...]
le gestionnaire devra apprendre à gérer ses propres conflits personnels.
Il devra apprendre à connaître les aspects divergents de sa personnalité
et à faire la paix en lui-même d’abord. En fait, les conflits qui
s’expriment dans la société et dans nos entreprises ne sont que
le reflet de nos conflits intérieurs. "
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HARMAN,
Willis et HORMANN John.
Creative Work,
Éd. IONS
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L’influence du modèle du guerrier dans l’entreprise,
toutefois, n’est pas toujours aussi évidente. Elle se fait également
sentir, selon moi, mais de façon plus discrète, dans la démarche amorcée
ces dernières années avec l’apparition des concepts d’excellence
et de qualité totale.
Lorsque je parle d’excellence dans le fonctionnement
et de qualité totale des produits et des services, je ne suggère pas
que l’efficacité est le but mais bien plutôt le moyen de trouver
un sens à son travail, à son action; et aussi le moyen de s’atteindre
par la démarche intérieure que la recherche de l’excellence inspire
et par l’engagement au plan social qu’elle suggère.
Permettez-moi de schématiser. Cette démarche visait au
départ à l’excellence dans le fonctionnement de l’entreprise,
à l’efficacité des intervenants à tous les niveaux et à la qualité
totale des produits et des services, ce qui allait exiger de la plupart
des entreprises une nouvelle culture. Il s’agit ici d’un autre
concept qui s’est imposé à la même époque. La culture d’une
entreprise peut s’entendre comme l’ensemble des valeurs qui
en inspire le fonctionnement, ou encore, comme le précise Gilles Charest :
" Ce que nous appelons
l’esprit de groupe ou l’esprit d’une entreprise est en
fait une forme-pensée, une forme de matière subtile née des aspirations
de ses membres. Nous regroupons souvent sous l’étiquette de culture
organisationnelle les valeurs, les aspirations qui lient les gens à
l’entreprise. "
Il est rapidement apparu qu’une telle démarche, qui
faisait appel à de nouvelles méthodes de gestion, parfois aussi à de
nouvelles technologies, reposait en dernière analyse sur les ressources
humaines. La démarche s’est alors traduite par diverses stratégies
qui visaient au développement des employés dans l’entreprise et
à leur motivation.
Dans un premier temps, on s’est préoccupé du développement
professionnel de la main-d'œuvre. Et pour ce faire, des spécialistes
ont été invités à animer des ateliers de formation (ou d’information)
à l’intention des cadres puis, dans certains cas, des employés.
Quant à la motivation, l’intérêt pour ce facteur d’excellence
et de qualité totale s’est surtout traduit à cette étape par diverses
améliorations apportées dans le milieu de travail: l'environnement lui-même
mais aussi, entre autres, la communication interne.
Cette étape franchie, il est apparu qu’une telle
démarche devait, en définitive, prendre appui sur l’excellence,
la qualité totale des intervenants eux-mêmes. C’est ainsi que,
dans certaines entreprises, on est passé de l’étape de la formation
(information) des employés à celle visant à leur transformation. Autrement
dit, du développement professionnel au développement personnel. Des
concepts de l’excellence et de la qualité totale non plus seulement
dans le faire, en ce qui concerne le fonctionnement de l’entreprise
de même que des produits et des services, mais dans l’être.
En d'autres termes, l’excellence dans le fonctionnement
et la qualité totale des produits et des services représentent un moyen
de s’atteindre pour parvenir soi-même à un niveau d’excellence
et de qualité totale. Par ailleurs, lorsque ce niveau est atteint ou
qu’une démarche dans ce sens est poursuivie, cela se traduit par
l’excellence dans le fonctionnement et la qualité totale des produits
et des services, du fait de l’interaction des deux plans :
le faire et l’être, à l’extérieur et à l’intérieur, sur
lesquels la démarche se poursuit parallèlement.
C’est en quoi, me semble-t-il, cette démarche recoupe
celle qu’inspire le modèle du guerrier.
Dans nos sociétés modernes, le monde de l’entreprise, des affaires
comme on dit, représente une force considérable dans l’orientation
de l’avenir. Ce sont les entreprises qui créent le plus d’emplois
dans les sociétés capitalistes. Ce sont aussi les entreprises qui attirent
la plupart des gens créatifs. Comme le font remarquer Willis Harman
et John Hormann à propos du rôle constructif des affaires dans une société
en transformation :
" L’entreprise moderne représente
la forme d’organisation la plus adaptable qui ait jamais été conçue.
À une époque de changement fondamental, on peut s’attendre à ce
qu’elle joue un rôle déterminant. "
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Voir
dans le
Guide Ressources
(mai/juin 1991,
Vol. 6, N° 5)
un article dans lequel David Gershon définit les qualités du guerrier
spirituel.
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... ou dans le domaine de l’engagement social
Je suis, quant à moi, particulièrement sensible à l’engagement
social du guerrier.
Voici quelques années, Jim Channan, lieutenant-colonel
dans l’armée américaine, faisait paraître un livre surprenant,
First Earth Battalion, dans lequel il suggérait de recourir aux techniques
de guerre pour former des gens aptes à servir l’évolution sociale.
Depuis, David Gershon, s’inspirant de cette vision, organisait
le First Earth Run – course autour de la terre, qui a eu lieu
en 1986, pour sauver la planète et à laquelle ont participé 25 millions
de personnes dont 60 chefs d’État –, expérience
qui devait l’amener à concevoir ce qu’il appelle le guerrier
spirituel.
" Pour que la cause de
la Terre soit servie, affirme Gershon,
il est temps que la voie de la contemplation et la voie de l’action
s’unissent! "
Ces nouveaux guerriers doivent mettre leur action au service
de Gaïa, la Déesse-Terre par un engagement dans le mouvement écologique.
Mais, parallèlement à cette action dans le monde, le guerrier spirituel
doit aussi poursuivre une démarche rigoureuse au plan psychospirituel.
Ses qualités sont le courage, la discipline, l’impeccabilité, le
pouvoir personnel, la dévotion, l’équilibre personnel, etc. Ce
sont, en gros, celles du modèle traditionnel du guerrier.
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WALSH,
Roger.
Pour Survivre à l’An 2000,
Éd. de Mortagne, Coll. " Par 4 chemins ".
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Dans son ouvrage Pour
Survivre à l’An 2000, le Dr Roger Walsh
évoque le modèle du guerrier, implicitement, lorsqu’il souligne
la nécessité d’un engagement lucide qui suppose de poursuivre,
parallèlement à l’engagement dans l’action et le service aux
autres, une démarche personnelle au plan psycho-spirituel.
" Nous
devons, rappelle Walsh, [...]
apporter notre contribution, mais dans un processus de croissance et
de maturation personnelles. "
Cette idée n’est pas nouvelle.
On ne peut guère parler du guerrier sans suggérer une liste de ses qualités
telles que le courage, la discipline, l’impeccabilité, etc. Je
ne trouve rien à redire à cela. Qui oserait en effet être contre la
vertu? Mais j’ai parfois le sentiment qu’il s’agit ici
de vœux pieux... et de mots dont on se gargarise. Il en va tout
autrement du travail sur soi comme l’entend le Dr Walsh. La nécessité
de progresser sur les deux plans à la fois: celui de l’engagement
et celui du travail sur soi, fait chez le Dr Walsh l’objet d’une
analyse, selon moi, magistrale.
Il faut dire ici que le Dr Walsh est
psychiatre, professeur de psychiatrie et de comportement humain à l’université
de Californie, engagé activement dans le développement de la psychologie
transpersonnelle, très sensible au rapprochement entre les psychologies
occidentale et orientale, bouddhique en particulier, et qu’il enseigne
aussi la méditation vipassana.
Selon lui, la crise de civilisation
que nous traversons aujourd’hui découle de nos croyances et de
l’apprentissage social dont nous avons été l’objet. C’est
à ce niveau que doit se faire le travail sur soi. Au niveau des peurs
et des mécanismes de défense, au cœur même, comme il le souligne,
de " la pathologie psychique de l’individu ".
Parmi les mécanismes de défense qui s’appliquent plus particulièrement
à l’étude des problèmes mondiaux, il mentionne la répression, la
négation, la projection, l’intellectualisation et la rationalisation.
" Le
résultat net de tous ces mécanismes de défense, c’est la ‘paralysie
psychique’. Cet engourdissement de la conscience nous amène à nier
la réalité du monde (et la nôtre) qu’il remplace par des illusions
déformantes et flatteuses qui entretiennent nos perceptions fausses
et trompeuses, alimentent nos dépendances et nos aversions, nous isolent
et nous aliènent, tout en aggravant les problèmes qu’elles avaient
pour but de nier au départ. "
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Il n’y a pas de doute dans mon esprit que le guerrier
doit poursuivre une telle démarche. Le savoir que la psychologie met
à notre disposition est considérable, en particulier, je dirais, depuis
que se précise l’apport de la psychologie orientale, et surtout
bouddhique.
Une démarche aussi rigoureuse ne va pas sans une certaine
souffrance: celle de constater que notre immaturité est en fait la cause
profonde de tous nos problèmes et qu’il nous faut devenir adulte
– un autre mot pour guerrier.
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" Le
héros est celui ou celle qui donne sa vie
pour quelque chose de plus grand que lui. "
Joseph Campbell
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CAMPBELL,
Joseph.
The Power of Myth – with Bill Moyers,
Éd. Doubleday
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En terminant ce survol de quelques signes qui permettent de penser que
le modèle du guerrier s’impose de plus en plus comme une réponse,
au plan individuel, à l’éclatement des repères en cette période de
crise, je veux mentionner l’influence, ces dernières années en Amérique,
du mythologue Joseph Campbell.
Campbell parle du modèle
du héros (le mot a ici le même sens que guerrier), car il s’agit
du héros que chacun doit être dans le temps
de sa vie. Son périple comporte
trois étapes: le départ, qui correspond au début de la phase active; l’initiation
par l’épreuve qu’il doit surmonter, qui correspond à la phase
du milieu de la vie (le mitan comme on dit aussi) qui est souvent l’occasion
d’une remise en question; enfin, le retour, qui correspond à la phase
de la maturité, puis du vieillissement.
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CHAREST,
Gilles.
Du management à l’écogestion,
Éd. Louise Courteau
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Le héros, rappelle Campbell, ne revient pas pour lui-même mais pour les
autres. Il revient pour témoigner et vivre pour les autres, car il sait
désormais que l’on vit les uns pour
les autres. Il s’engage au plan social pour la suite du monde.
Le héros revient donc, en fait, pour se placer dans des situations qui
vont favoriser l’éveil des aspects supérieurs de sa nature, afin
de poursuivre sa croissance.
Cette structure, qui
est selon Campbell celle des grands mythes et qu’il rapporte ici
au cycle de vie, ne sous-entend pas qu’il faille nécessairement attendre
d’avoir passé le cap du mitan de la vie pour s’engager au plan
social. On peut et on doit le faire à tout âge. Mais on observe que l’engagement
découle souvent d’un certain travail sur soi en particulier au plan
psychospirituel, à la faveur d’une remise en question de sa vie qui
se produit chez la plupart autour de la quarantaine. C’est généralement
le temps qu’il aura fallu pour acquérir du pouvoir dans le monde
de l’action et comme l’observe Gilles Charest :
" Parvenu
à ce stade de sa vie (celui où on se pose la question: le pouvoir pour
faire quoi?), on a l’impression d’avoir prouvé suffisamment
sa valeur, on a perdu le goût des combats à gagner pour se sentir vivant,
on cherche un nouveau type de défis qu’on trouvera en mettant graduellement
ses habilités au service de sa véritable mission d’être humain.
C’est l’occasion d’un engagement plus conscient au service
des autres. "
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On a pu observer depuis peu qu’un certain nombre de ceux qui, dans
les années soixante, ont eu besoin d’aller à l’intérieur d’eux-mêmes
pour apprendre quelque chose de fondamental qui leur échappait, ressentent
maintenant le besoin de se tourner vers l’extérieur, de s’engager
dans le monde; ce qui les aidera à revenir éventuellement à l’intérieur,
mais plus en profondeur.
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